FANTAZIO, TALES

 

                                     FANTAZIO / BIOGRAPHY / TALES /

 

 

 

 

 

Fantazio

 

 

 

 

 

 

 

© Cyrille Choupas

 

 

 

(...) il se met à jouer dans un style hasardeux, mêlant cris, coups de pieds dans le bois de la contrebasse, phrases surgissant de l’inconscient en anglais, français, espagnol, sa musique contient des lambeaux de rockabilly, de jeu rythmique africain au temps inventés et bancales, transes de cinq temps, et de voix de dessins animés, graves et aigues, ne chantant rarement avec sa voix naturelle : étourdi et ivre des nuits pleine de fruits de hasards (...)

 

Si vous n'avez pas songé à changer de métier, vous devriez ! Votre prestation d'aujourd'hui à Pondichéry était pitoyable, une véritable honte. Et vous avez fait honte à l'Alliance française !

Éric Dupuy, facebook, 2014

 

Le contrebassiste, chanteur et performer Fantazio,trimbale sa pomme de crooner indélébile depuis une vingtaine d'années aux quatres coins des musiques hors-norme. Tour à tour one-man band furieux, improvisateur agité, compositeur méticuleux, agitateur populaire, poète et acteur solitaire, jazzman bordélique, ses collaborations rempliraient un carnet de note, de Benjamin Colin à Charles Pennequin en passant par Katherina Ex. Responsable de quelques disques aussi rares qu'indispensables, on le retrouve régulièrement aux côtés de la batteuse percussionniste japonaise Emiko Ota avec qui il partage volontiers le goût de l'aventure.

FranQ de Quengo, 2013

 

Fantazio est né en 1972 à Paris.


A l'âge de 15 ans, il hérite d'une contrebasse et joue à Belleville, à Paris, dans tous les lieux ouverts possibles.

Engagé dans la compagnie de rue les rémouleurs, il s'initie au théâtre et aux chansons.

Dix ans de performances solo. Il part un an à Pékin, trois ans après Tien An Men et au retour il improvise à Berlin  (Berliner Ensemble, galeries d’art) jusqu'en 1999.

Fantazio Gang est monté avec le percussionniste Benjamin Colin, pour 2000 concerts jusqu'en 2013.

Deux disques avec cette formation volontairement protéiforme avant de se consacrer à nouveau à l'improvisation.

Préoccupé par la rupture des rythmes, des situations et des angles d'attaque, il se met à collaborer avec de nombreux musiciens, dans les salles comme les théâtres. Il élabore ainsi des performances qu'il appelle accidentées en Europe, Afrique, Asie et Amérique latine. Toujours accompagné de sa contrebasse, de sa voix qu'il peut tordre et surtout les langues : l'italien, l'espagnol, le chinois, l'anglais et le français.

Ses spectacles  deviennent des situations où se mêlent musique, performance théâtrale et poétique, creusant chaque fois un peu plus les liens entre troubles intimes et sociaux.

Histoire intime d'Elephantman, un monologue qu'il écrit décrit un monde psychique tissé d'associations d'idées, joué 150 fois, dont Avignon (2016-2017), le théâtre du rond point, Paris,et de nombreux autres théâtres en France, Suisse et Belgique)

Il co-réalise deux films, Grand appartement, avec Philippe Petit, et Je reviens dans cinq minutes, mécéné par Antoine de Galbert, collectionneur d'art (La Maison Rouge, Paris).

Le film traite des rapports avec son père et l'accompagne, jusqu'à sa mort.

Ivan Denys, son père, s'était engagé dans la lutte armée à l'âge de treize ans à Paris, jusqu'à la libération de Paris.

Fantazio prépare un roman sur ses années d'enfance (sa mère, Argentine, meurt en 1982), un disque à venir avec Francesco Pastacaldi et Yurie Hu, et est engagé par Claude Schmitz à Bruxelles (théâtre royal de Belgique) et Liège pour la suite de sa pièce Un Royaume.

 

 

 

J'ai un intérêt certain pour les transformations en tout genre, et les logiques figées qui entretiennent des chemins déjà mornes sont les plus spectaculaires en terme d'audience.
Comme je maudis l'entresoi de l'underground, ou de tout autre milieu, je maudis toute forme qui se croit importante pour retrouver des formes toutes nues, que nous sommes trop construits pour comprendre.

Fantazio, Rennes, 2016

 

 

Le choc arrivera un peu plus tard dans l'après midi, sous les traits de Fantazio. Il porte un nom d'artiste magicien. Le masculin de Fantasia? Non, il est bien plus puissant qu'un simple magicien. Il a la gueule des mauvais garçons, ceux qui vivaient au siècle dernier. Son nez est celui d'un boxer. Il a le regard profond d'un enfant. Ses oreilles, s'ouvrent toutes grandes autour de son visage singulier. C'est une personnalité chaussée de godillots qui accompagnent ses pas depuis tant d'années...C'est un chercheur d'âme, un explorateur de territoire. Un musicien jusqu'au bout des ongles dans une première vie, mais que les réflexions et les mots traversent ,de parts en parts, en flèches nourricières.
Il pose son silence, sa nervosité tenue. Nous sommes aimantés par ses moindres gestes. Sa main peut être couperet, sa voix calme peut porter haut. Les langues se brassent dans leurs variétés chantantes. Son élégance sobre s'affirme et son corps ne ploie jamais. Pourtant on devine les blessures, les cicatrices. Ils nous les dessine à demi mot. Chercheur explorateur timide envers l'autre, qui fouille dans son corps labyrinthe. Nous le suivons dans le cheminement de ses pensées exprimées à voix haute. Nous restons suspendus à ses silences, espaces libres pour nos propres réflexions, en lien avec lui. Il construit et déconstruit. Il chiffonne puis morcelle petit à petit un bout de papier, au rythme de ses bribes d'histoires.
Il est homme éléphant, à la volonté, la force, la générosité inépuisable. Il se voit avec ses difformités, mais en réalité il doit avoir un miroir déformant, car pour nous il est beau et puissant. Il est l'artiste multiple, qui fouille en permanence à la recherche de sens et il nous offre de la vision.
Son jeu fragmenté, en aller et retour, en mouvement, accélération ou arrêt sur image, nous fait voyager dans notre propre cortex. De nos sièges en plastique moulé, nos corps se déplient pour se lever et nous en sortons émus et grandis.

Sylvie Lefrère, Avignon, 2015

 

 

 

 

Qui est ce personnage, assis derrière son bureau, au propos psycho-maniaco-philosophique, dont le « ça » s’invite itérativement au micro, créature protéiforme à la folie latente, produisant des réflexions liées à l’introspection pertinentes tout autant que des transitions illogiques et des exemples loufoques ? "Histoire Intime d'Elephant Man", c'est une plongée schizophrénique dans la pensée complexe d’un être qui tente de faire table rase - du passé? du conventionnel? de soi-même? - pour mieux tenter de reconstruire une vision humaniste structurée.

 Ardue tâche que de résumer le travail de ce prodigieux comédien-poète sans risquer de se noyer dans les abysses aliénantes d’un esprit en surchauffe…d'abord parce que l’on a été face à un être déstabilisant qui nous a communiqué son « vertige angoissant ». Mais l’on a ri beaucoup aussi, face à un absurde avec lequel on met immédiatement une distanciation protectrice mais qui fascine irrémédiablement. Les mots servis sont d’ailleurs métaphoriquement exquis ! Ne vous êtes-vous jamais senti comme «une cathédrale renversée »? « Le réel très lisse » ne mérite-t-il pas, selon vous, d’être bousculé ? Si «aller bien, c’est collectionner des moments de kifs », réalise-t-on à quel point la société impose la segmentation et la dislocation agressives? Fantazio nous promène à l’envi dans les rhizomes de son imagination et use de tout son talent d’acteur pour rendre son personnage foncièrement attirant parce que carrément atypique. « Ce solo, dit-il, traduit les voix multiples qui m’ont nourri, m’encombrent, m’empêchent de dormir et débordent des parois de ma peau. » 

Et bien ça fait du bien, ici, de «  se faire râper le visage quand on se sent un peu flou »! Et si nous pouvons dire « Je vais défigurer Frederic » sans problème de par notre maîtrise parfaite des phonèmes français, n’avons pas forcément vécu une année morne de merde et qu’aucun traumatisme - peut-être - ne déforme nos journées et nous a fait contracter « un pacte d’empathie avec l’homme-éléphant », cette étonnante prestation scénique fonctionne tout de même sur nos zygomatiques et nos neurones à merveille ! C’est sûrement au sein du non-sens que se cache l’essentielle vérité des choses. La preuve, dans cette confusion extrême, on a eu l'impression d'y voir plus clair ! Allez hop! « Pont-Levis! Fin du Moyen-Âge! »…Ben quoi, qu’est-ce qu’on a dit?

Le passé, c’est le Sud. C’est plus chaud parce qu’il s’est passé beaucoup de choses.

Julie Cadilhac, Avignon, 2017

 

 

Fantazio est un être étrange. Fascinant, un brin schizophrène. Le voir en concert, entouré de sa troupe de musiciens, c’est entrer dans un univers réjouissant et sautillant, balloté entre mille influences, propice à la communion collective. Un genre d’Elvis punk sauce contrebasse expérimentale, qui ne vit que pour atteindre un Graal, la « musique populaire », et qui n’a pas de mots assez durs pour vilipender ceux qui l’enterrent.
L'homme-contrebasse bâtit sa légende au gré de performances aussi déjantées sur le fond que dans la forme, au moyen d'une maîtrise inouïe du barrissement d'éléphant et d'un sens aiguë de la comptine enfantine remise au goût du jour rock ou punk. Trois ans après The Sweet Little Mother Fuckin' Show, l'énergumène revient avec un second pavé dans la mare de " la musique populaire ", celle-là même qui donne son titre à l'une des chansons manifestes de ce nouvel opus. Sombres rêves ou tendres cauchemars, son univers est une bouffée d'air, toxique pour les tenants du consensus, enivrante pour qui veut bien y prêter une oreille.

Dominique Queillé, Libération, 2009

 

 

An Unidentified Musical Object.

 

An expression often used haphazardly, but in this case, illustrates Fantazio’s universe perfectly. A true showman, a spirit haunted by incredibly extravagant creativity, bringing together the most divers crowds over the course of his performance-like concerts.

Covered in tattoos, traumatised for a long time by the figure of Elephant man without having seen the film, his stage name inherited during his punk era, this wild individual is a character out of the ordinary and his music totally uncategorised.

As if he and his doublebass where one, his fingers bashed by mishandling the cords, he has travelled with his peculiar music throughout different countries, concert halls, bars, street alleys and is now propelled as one of the most fantastic figures of the Parisian alternative scene.

If one had to detect all the different styles in this musical ensemble (one might judge as having no head or tail), you could probably find as much scruffy punk as anxious jazz, hazy hip-hop or truculent childish, dadaist speechs, brassy rock as well as electronic rhythms.

A mixture between an aniseed (the drink) brass band and a surrealist experimental work shop, the man-elephant and his Gang playfully dodge expectancies using noises that wander and tranquil sounds to the limits of obliteration. At the centre of these treasures of musical inventiveness, Fantazio narrates, sings with his malleable voice, spits out, roars,howls, becomes a malicious geisha or either a crude crooner, his sudden outburst of words instigate strange stories in a hallucinated storyteller posture.

 

Samantha Lavergnolle, Saxon version, 2009

 

Fantazio est né Fabrice Denys en 1972 à Paris.

1981 sort le film Elephantman de David Lynch ; il voit l’affiche énorme dans le quartier de Montparnasse à Paris, et la vue simple de l’image augmentent ses angoisses exponentiellement, qui dureront, toujours accompagnées par le trouble de cette image : plis dans un drap, et trou pour l’œil, dureront plus de dix ans.

Sa mère, Argentine, sentant ses angoisses précoces d’enfant,  avait décidé de l’emmener chez un psychanalyste, elle meurt un an plus tard en 1982.

Son père l’envoie en Argentine seul à onze ans dans la famille de sa mère, où ça se passe mal, il ira par la suite toujours seul, plutôt en Colombie, chez une amie.

A Bogota, il lit l’arrache cœur de Boris Vian, puis plus tard, tous ses livres.

Les odeurs de ce pays et sa violence le marquent définitivement.

Un pion du lycée lui offre une cassette des Cramps et groupes psycho anglais, ces sons lui font un effet d’une puissance irrationnelle.

Aussi un livre de Richard Wright, écrivain noir américain, Black Boy.

A partir de 1984 il devient punk et parcourt les rues de Paris jusqu’à 18 ans, avec une bande de punks, skinheads, arabes, tous plus âgés que lui et poly-toxicomanes.

1983: Quelque problèmes avec la famille argentine à Buenos Aires

1986: découverte de Boris Vian à Bogotà.

À quinze ans, de grand-mère paternelle, dactylo, pianiste et chanteuse d’opérette amateur, il hérite d’une contrebasse et joue seul dans les rues de Paris et le métro, en autodidacte.

La fin du punk donne naissance eu mouvement techno, dont il se méfie, mais découvre les free-parties des travellers anglais qui l’emmènent à Brighton dans des fêtes sauvages sans fin.

En 1992 à Pékin, ’alcool, mélancolie, écriture de textes.

Chez les Ouïghours, un mois au Xin Jiang, voyage irréel Urumqi, Kashgar.

Hainan Dao, Sanya, Haikou, Chengdu, Shanghaï, Guang Zhou.

1994, En Colombie auprès de sa mère adoptive, désenchantement du milieu underground français, auprès du projet Mano Negra, train de "l'expresso del hielo", inspiré à l'origine de Gabriel Garcia Marquez.

En 1995,  à Berlin, et se met à jouer dans un style hasardeux, mêlant cris, coups de pieds dans le bois de la contrebasse, phrases surgissant de l’inconscient en anglais, français, espagnol, sa musique contient des lambeaux de rockabilly, de jeu rythmique africain au temps inventés et bancales, transes de cinq temps, et de voix de dessins animés, graves et aigues, ne chantant rarement avec sa voix naturelle : étourdi et ivre des nuits pleine de fruits de hasards et coïncidences, il rentre avec son instrument sans qu’on l’attende dans des forêts de lieux interlopes, squats temporaires, bars, et fêtes privées où il fait arrêter la musique pour qu’on l’entende pousser ses cris, jouant 10 minutes mais très fort, et se promettant que les personnes présentes ne l’oublieront jamais, par l’étrangeté de ses cris et phrases jetées, et que ces interventions-performances inconscientes finiront par former un collier de perles, comme un animal hors de lui, qui subira des mutations de manière autonome sans que lui-même n’en soit conscient.

C’est cette image qui le hante : une collection de situations de tous types, traversant tous les milieux, tous les réseaux, jusqu’à l’inconfort, toujours en utilisant l’improvisation, pour ne pas « étouffer lui-même ».

En 1999 il commence la guirlande vertigineuse de collaborations souvent improvisées, des duos sauvages notamment.

Il fonde un groupe en 2000, le Fantazio Gang, avec qui il fera près de 600 concerts  qui durent souvent entre trois et quatre heures, jusqu’à sept heures parfois, comme dans un squat à Bruxelles en 2003.

En 2005 sort un disque des morceaux joués auparavant pendant dix ans, the sweet little mother fuckin’show’.

Suivront dix ans de tournée dans toute l’Europe, le groupe se déformant sans cesse pour encaisser tous les coups quelle que soit l’absence d’une partie des musiciens, cela doit faire partie de la longue œuvre déformée.

Avec le succès underground de ce disque, Fantazio disparaît quand la visibilté, relative, devient trop forte, les salles trop remplies, et recommence des concerts improvisés formant des duos avec des personnes qu’il n’a jamais rencontré auparavant, pour plus de 400 concerts partout en Europe, il forme ce qu’il appelle des groupes one shot, pour un seul soir, avec les combinaisons multiples des musiciens, qu’il connaît ou pas du tout, toujours dans un style minimal et sauvage.

Il commence des interventions régulières dans des hôpitaux de jour pour autistes.

Il parle de plus en plus dans ses concerts, des discours étranges et dadaïstes racontant la vie mentale trop forte et exprimant la perception de plusieurs réalités en même temps.

En 2009 sort un deuxième album qu’il vit mal : trop de musique, trop d’invités, son intention est noyée dans une musique qui part dans tous les sens.

Il forme depuis 2010 un duo récurrent avec Francesco Pastacaldi, ils partent en Inde, forment un groupe dont la chanteuse indienne finira par avoir des troubles sur scène, et le groupe s’arrête.

Depuis 2015 ils jouent en trio, le troisième musicien, soit au Ms 20, soit guitaristes, soit bruiteurs, changent tout le temps.

A la fois reconnus, et toujours hors circuits.

Ils jouent depuis dix ans une trentaine de morceaux avec différents arrangements, qui sont rarement enregistrés.

 L’écriture d’un monologue, sans musique, parlant une heure et demie à une table, Histoire intime d’elephantman - qui traite de la monstruosité de la vie psychique et la stupeur enfantine devant les codes de temps, et de l’organisation humaine- l’aide à se rassembler, à retrouver des forces et une base, un socle, après des années de musique dans un grand éclatement de situations.

Retour de performance solo, orales ou musicales, cette fois à nouveau dans tous les lieux que le hasard de ses réseaux multiples a fait naître toutes ces vingt cinq dernières années : musées, théâtres.

Musiques de film, acteur dans des films courts, il développe des vidéos courtes de pensées politiques et poétiques, brutes.

Deux disques de musique improvisé sortent malgré tout, sans label : un duo avec Katherina Ex, premier concert-rencontre fragile enregistré, et un trio avec le saxophoniste hongrois Akosh et le batteur français Denis Charolles : disque de répétitions enregistrées montées par Akosh, semble un voyage sonore issu d’un film.

Il réalise un film sur son père, né en 1926 à Paris, résistant pendant la deuxième guerre, et réussi, avec l’aide spontanée d’un collectionneur d’art brut, art contemporain et choses rares, obsédé par la mort : Antoine de Galbert ; à le filmer avant que la vieillesse, puis le Covid et l’isolement, lui fasse perdre en partie la tête.

 

 

BIOGRAPHIA _ LATIN

Il contrabassista, cantante e performer Fantazio, porta

la sua indelebile faccia da crooner da ormai vent'anni

a destra e a manca, in giro per il mondo della musica

fuori-norma. Di volta in volta one-man band furioso,

improvvisatore agitato, compositore meticoloso,

agitatore di masse, poeta e attore solitario, jazzman

confusionario. Delle sue collaborazioni si potrebbe

riempire un intero quaderno, da Benjamin Collin

a Charles Pennequin passando per Katharina

Ex. Responsabile di alcuni dischi, rari quanto

indispensabili, lo si trova regolarmente al fianco della

batterista-percussionista giapponese Emiko Ota, con

la quale condivide anche l'amore per l'avventura.

Frank de Quengo, per la presentazione

del disco GGots des Harry's,

Franq de Quengo: (settembre 2015)

 

 

 

Fantazio collectionne les appellations contrôlées : musicien, comédien, auteur-compositeur-interprète, improvisateur, histrion, trublion, poil à gratter... Des appellations forcément réductrices qui laissent de côté la profondeur du personnage pour ne mettre en avant que sa fantaisie. Alors qu'il y a du fond chez le contrebassiste-chanteur. Engagé et engageant, il poursuit une démarche on ne peut plus cohérente : créer du lien et de la poésie " live ". Fêtes forcément inattendues, ses concerts se présentent comme de grands barnums improvisés. Punk de culture, pas forcément jazz, pas franchement chanson, Fantazio a su trouver comment magnifier l'art de l'à-peu-près, étonner son monde et susciter des rencontres-choc placées sous le signe de l'instinct. D'autant qu'il marche au coup de cœur, de ses consoeurs Joëlle Léandre ou Sarah Murcia à l'accordéoniste René Lacaille, en passant par Akosh S, Rodolphe Burger, Camille Boitel, Jean-Yves Ruff, les Indiens déjantés d'Indus Bandits ou le Quatuor Bela, sans oublier son propre Gang. Lauréat de l'Académie de France à Rome - la Villa Médicis, où il a été pensionnaire en 2016 en catégorie musique, la création Lullaby Péplum avec Théo Ceccaldi sera le premier nouveau projet de son retour en France.

Histrion, trublion, poil à  gratter. Fantazio collectionne les appellations contrôlées. évidemment réductrices, elles délaissent la profondeur du personnage pour n'accentuer que sa fantaisie. Entre décroissance, artisanat et DIY, le contrebassiste-chanteur n'est pas là pour " vendre du disque ", mais pour créer du lien " live ". Pas vraiment punk, pas tout à fait jazz, pas franchement chanson, il magnifie l'art de l'à-peu-près et marche au coup de cœur. Après Joëlle Léandre, Denis Charolles ou Katherina Ex, il a " flashé " pour le saxophone ondulatoire de l'ex-ONJ Antonin-Tri Hoang lors d'une soirée hommage à Jacques Thollot en début d'année. Une rencontre de bonne augure!

Xavier Lemettre, Banlieues Bleues, 2015

 

Improvvisatore che a scelto in quest"anno in residenza a Roma di lasciare un po' riposare i suoi vent'anni d'improvvisazione musicale per scrivere testi e discorsi sociali, politici e poetici, Fantazio, Invitato dalla filarmonica romana, fara un concerto composto di testi, su musica improvvisata o composta qua a Roma: un discorso del Papa Francesco del 24 dicembre 2020, qualche testi di Maiakovski, e qualche improvvisazioni verbali e sonori, in una piccola stanza leggera e carina del secolo XVI del piano terra della Filarmonia. Per questa forma, invita Antonin Tri-Hoang, stella bruciante del jazz improvvisato francese, tra ricerca curiosa e melodista furioso.

Fabrice Denys, detto Fantazio, è nato nel 1972. All'eta di 15 anni ha ereditato un contrabbasso, che poco a poco a imparato a suonare. Ha cosi cominciato a esibirsi per strada come solista. In seguito si è trasferito per un anno a Pechino e poi a Berlino, dove ha continuato a lavorare all'improvvisazione e dove è restato fino al 1999. Interessato alla rottura dei ritmi, delle situazioni e degli angoli di attacco, ha collaborato con numerosi musicisti, in sale da concerto e in teatri. Ha così elaborato performance "improvvisate" in Europa, Africa, Asia e America latina, sempre in compagnia del suo contrabasso e della sua voce, che "piega" nelle varie lingue che ormai conosce: l'italiano, lo spagnolo, il cinese, l'inglese e il francese. I suoi spettacoli diventano delle situazioni in cui musica, performance teatrale e poetica si mescolano per scavare sempre più nei legami fra disturbi intimi e sociali.

Académie de France à Rome, Rome, 2015

 

 

Après vingt ans de joies et catastrophes,

de sacs entiers de textes perdus et d'amitiés retrouvées,

FANTAZIO vous présente

Un fantaztico voyage au pays des enfants déformés,

En quatre tomes sonores,

truffés de Rockabilly-Hip-Hop improvisés, chansons militaires régréssives, Nursery Rhymes, Jazz primitif et psycho-anal-groove.

Pour chaque don de sang sûr dépassant 80 euros: une chanson improvisée de trente secondes à partir de votre prénom et d'un traumatisme enfantin de votre choix.

 

 

Il est comme ces affiches qu'on déchire, qui laissent apparaître les bribes d'affiches plus anciennes, on tire des lambeaux, ça fait apparaître des couleurs, on superpose un chiffre, une pizza, un clavecin, Trump, un aspirateur, On déchire un immeuble, ça dévoile une bouche qu'on lacère, une forêt jaillit dans la bouche de l'immeuble, on balafre une lèvre, le fragment d'un avion percute une horde au galop, on déchire et des sirènes-bazooka sur la pizza, on déchire et Marilyne Mitterand, on déchire et ça fait des monstres, on déchire et ça fait des énigmes, ça n'est jamais pareil, Fantazio. Il est une danse infinie dans laquelle le passé surgit, un passé aussi vivace qu'un présent, aussi surprenant qu'un futur, c'est une infinie métamorphose qui voudrait que le présent soit à nouveau le chaos qui contiendrait enfin tout l'univers.
Fantazio vient clore notre festival, nous ne savons heureusement pas à quoi ressemblera sa tentative. C'est exactement ce qu'on espère de Fantazio : ne pas savoir.

Nicolas Flesch, 2016

 

Fantazio, c'est pour moi, et qu'elle que soit la forme qu'il choisisse, l'une des écritures contemporaines les plus vertigineuses.
Dans cette Histoire intime d'Elephant Man, il n'y a pas d'instrument, il est tout seul avec ses papiers, les lumières d'Hervé, des bricoles, ses forêts, ses fantômes... Le vertige qu'il fabrique en faisant apparaître ce qui le peuple et comment il fait pour dompter les mondes qui l'encombrent n'en est que plus fracassant. Comment de ce masque qui l'avala, il en a fait sa force plutôt que sa chute, ou bien comment sa chute est neuve.
Le rire que me procure son écriture est un rire rare, un rire que je recueille chaque fois bien au fond comme une force nouvelle. Une force pour vivre.

 

Fantazio ? Un nom d’oiseau pour drôle de zig que vous connaissez sans doute si vous aimez traîner vos guêtres hors des sentiers battus. D’un coin de bitume de l’Est parisien aux comptoirs les plus reculés de l’'Hexagone en passant par le squat d’à côté, l’'homme-contrebasse bâtit sa légende au gré de performances aussi déjantées sur le fond que dans la forme, par une maîtrise inouïe du barrissement d’éléphant et un sens aiguë de la comptine enfantine remise au goût du jour des ancêtres, les tribus mythiques du rock, du punk, et de leurs pires ennemis. Trois ans après The Sweet Little Mother Fuckin’ Show, l’énergumène revient avec un second pavé dans la mare de « La musique populaire », celle-là même qui donne son titre à l’une des chansons manifestes de ce nouvel opus, un tube hip-hop en puissance savamment chaloupé avec la complicité de René Lacaille. A l’instar de cette rencontre avec l’accordéoniste réunionnais, le tour de manège auquel convient Fantazio et son combo s’inspire de ses errances, vécues ou fantasmées, toujours subversives et authentiques. Une équipée sauvage et poétique dont les montures parlent français, anglais ou italien, mais tendent surtout à provoquer l’électrochoc d’un nouvel idiome musical. Antithèse à l’exercice de style, celui de Fantazio brasse et brouille les formes convenues du jazz franchouillard et du yéyé birman, du pogo rituel, de l’afrobeat spaghetti et de la fanfare techno. Autant de chinoiseries soigneusement mises en boites sur une production plus léchée qu’on ne pourrait s’y attendre de la part d’un artiste à l’aura de fou furieux. Heureux trublion de la scène alternative, notre crooner a définitivement plus d’un tour de bruitages et de swing à offrir en partage. Sombres rêves ou tendres cauchemars, son univers est une bouffée d’air, toxique pour les tenants du consensus, enivrante pour qui veut bien y prêter une oreille. Ouvrez la vôtre, l'’Elefantazio arrive à grands pas près de chez vous.

 

The French Music Review Fantazio / The Sweet Little Mother Fuckin’ Show

"Beats made by beasts" The Sweet Little Mother Fucking Show is a hard album to review.

 

There’s no use saying it reminds you of so and so as the usual genres and reference points go out the window for this one. The album feels a little bit like a travelling circus or a travelling experiment where anything goes. If the album where a film it might look something like ‘time of the gypsies’. It’s more of an experience and by the end of it you feel like you’ve been invited into another realm of possibilities. Central to the sound of the record is of course the double bass of Fantazio himself. Guitar, drums, saxophone, percussion and samples are some of the instruments and sounds which then flesh out the score of this gypsy-like extravaganza. The SLMFS sets out to travel the globe. The voyage begins with opener 'Seven Days' where the singer wakes up in Rome and further travels then include Thailand, Japan and London. But the record doesn’t just travel lyrically it also travels musically. In fact some parts of the record sound like an ongoing improvisation. As though the travelling or improvisations are happening as we listen to them. Perhaps this is what Fantazio is alluding to when he sings on ‘Learn’, “help me to learn day by day how to catch the wind and let it fly away”. This voyage, perhaps like the improvisation, should have no end. It is the voyage itself and not the destination that is important. When you reach the destination you should let it fly away or you’ll never move forward again. This idea gets re-emphasized on track ‘Debarasse Toi’ where Fantazio puts the point across more crudely, “Debarrasse toi de tout ces idols et en invente des moins connes et têtue. Debarrasse toi des contractions bien figées et débrouilles toi de continuer un chantier”.There are some great lighter pop moments on this record. ‘Adrile Dreams’ grooves along in a dub reggae kind of way with a twinkle of piano stuck in here and there. ‘El Docteur’ jumps and swings away nicely. It’s the kind of song that could even get mainstream radio play if it weren’t for the fact that the junkie in the song keeps wanting to “fuck his doctor”. It seems that popularity isn’t something that Fantazio is going to give into easily. On ‘La Musique Populaire’ he tells detractors advising him on how to attract more people to his concerts that their “pop and rock festivals” can basically go and fuck off. There is a real punk sensibility to Fantazio. You feel that he’s created his world on his own terms. Which may be why, on track 15, ‘Punks of London’ he sounds pretty disillusioned with the “official” punk philosophy which has evolved so little since the late 70’s. “Punks of London, they don’t know my name” he seems to shout reproachfully. ‘Sad times’ is a beautiful song which fittingly brings the album towards its end. I could imagine Lotte Lenya singing this. The SLMFS has taken us through the joys and tribulations of life and now this song touchingly brings the voyage to a close and celebrates death as a renewal rather than an end, “when these sweet lips are getting sad and over, another wind is coming right behind”. Fantazio assures us there’s nothing to be worried about since “les anges qui connaissent bien leur métier” will take care of us. The theme is repeated on the final, hidden track. It’s a jaunty and more upbeat song that comes over almost like a Hare Krishna chant. Fantazio sings cheerfully and repeatedly and rhetorically, “are you going to be living or dying” in this world? SLMFS is a debut album but this sounds like it could just as well have been their fifth. This is a band with a cult live following and the danger was always that SLMFS would disappoint and sound tame. Nothing could be further form the truth. Fantazio and his gang sound like they’ve taken ten years of blood, sweat and tears and condensed it into a great 60 minute mother fucking show.

 

By Carl Siewertz February 27, 2006

 

 

 

Fantazio, Un vilain Bonhomme pas rigolo

mercredi 21 octobre 2009  17:55

La première fois que j'ai croisé Fantazio, en 1987, j'ai voulu le kidnapper pour le torturer tranquille avec les copains à la maison, il avait l'air trop gentil. Faut dire qu'avec son air faussement nonchalant, sa gueule de doux métèque imberbe, il détonnait salement au milieu du troupeau d'apprentis grosses couilles que nous formions alors. Nous étions Psychobillys et les psychos c'était pas des pédés, la protubérance capillaire qui ornait notre front était là pour le rappeler.

En bon psycho, Fantazio trimballait déjà une contrebasse sur son dos, il se joignait parfois à nous lorsque nous tapions la manche dans le métro. On le trouvait pas assez précis, on le charriait, lui il s'en foutait. Pour la peine, il a joué tout seul, jour après jour, mois après mois, de squats en rades, et nous on a bien été obligés d'arrêter de le chambrer. Il était devenu ce type capable de faire danser les gens pendant trois plombes, aussi bien tout seul qu'entouré d'une douzaine d'acolytes. Au début on a un peu renaudé, ce mec là ne respectait aucun des dogmes rock'n rolliens en vigueur, il se sapait n'importe comment, il pouvait jouer avec des jazzeux, même des noirs parfois, devant un parterre de chevelus, voilà qui n'était pas orthodoxe. Il nous a pourtant fallu rapidement admettre qu'entre ses tirades hautement déconnatoires et ses improvisations à la limite de l'experimental, on se fendait tout de même bien la gueule à ses concerts, et nous rendre à l'évidence : de nous tous il était le plus capable   d'établir les conditions matérielles d'une disponibilité partagée à la joie,  créant ainsi une communauté aussi tangible qu'éphemère.
Il y a trois, quatre ans Fantazio, Frank, Bud et tout le gang avaient sorti un joli disque, bien intéressant , même s'il ne parvenait pas toujours à restituer la folie de leurs concerts. Ils viennent d'en bricoler un nouveau qui fleure bon le tonfa dans ta gueule et la terrorisation démocratique dans ton esprit. Un disque pour twister gaiement dans l'air du temps, qui raconte l'indicible, la séparation grandissante entre les êtres voulue par la grosse vieille machine molle, qui hurle la désolation de notre temps et le refus de celle-ci.
Fantazio aurait été un peu plus gentil, il partagerait l'affiche des grands festivals avec Sensemilia et nous on pourrait s'acheter de chouettes tee-shirts. A une époque ou il est de bon ton de chier une musique savamment métissée, vêtu de guenilles bien repassées, Fantazio n'en fait qu'à sa tête. Dans ses concerts c'est le bordel, ça grouille ça vit, les gens suent, rigolent ensemble et deviennent amis.
Mais des amis, c'est dangereux, ça discute et ensuite ça veut habiter ensemble les grands déserts sans bancs éclairés au néon.
Fantazio fabrique des amis, on se demande ce qu'attendent les brigades antiterroristes.

Thierry Pelletier, 2009

Commentaires

1.Le mercredi 21 octobre 2009  19:20 .

Youhou, il est pas mort le Pelletier!
tabarnak, tu t'es fait désirer!

2.Le mercredi 21 octobre 2009  21:09 .

C'est vrai que pour ce qui serait d'donner des nouvelles, il se foule pas l'Cochrane.
Mwarf.

3.Le jeudi 22 octobre 2009  00:38 .

La première fois que j'ai croisé Fantazio, c'était dans les squats d'artiste, sil y a dix ans.; depuis, entendu parfois sur Inter, suivi dans des concerts fabuleux à l'Européen (y compris en soutien à Julien Coupat) et ailleurs, écouté son disque.. Et vous savez quoi? "reconnu",il ne change pas pour autant le bougre !

4.Le vendredi 23 octobre 2009  09:12 .

ah mama ! le fameux 21 juin devant un rade de la goutte d'Or : nous à la terrasse (on était au moins 4...) et avec son acolyte,les coups de chaines sur la contrebasse et devant les flics " la chasse est un sport français"
puis des années après avec des rappers de choc (quel choc quelle fête) et qq années après avec des japonais punks (quelle fête)
 

5.Le samedi 24 octobre 2009  22:30

C�lisse, il a encore du jus dans sa plume !
je seconde : hip hip hip Tabarnak !

6.Le samedi 12 d�cembre 2009 � 13:21

je me souviens que t'attendais quand même l'occasion de le baffer, vu comment il était énervant. P'têt' que t'as été atteint de vieillesse champêtre et de commistration bucolique...

 

A Poem,  Written by Miss Samantha Lavergnolle.

A band whose forms are always in motion
Able to change shapes so to dodge the blows,
This unusual music Gang steered by Fantazio
Had seen twenty musicians entering in, to and fro

All of them - be it for an evening or for a night,
Or even on tour for five years, under hot lights
Grounded by a core of 6 solid musicians
- All could make of an odd sound, or odd situation
The spur of a moment’s most splendid acquisition

They all carried in some needs, some wants,
some desires and ideas…
Which then in turn would fabulously nourish
The beast’s digestive behaviors in order to flourish

During those cruel times of standardised rock
(specifically customised for festival stock)
Fantazio’s Gang managed it’s own slithering way
From underneath all the clique’s clichés
(Just like a boa, it’s skin peeling at every new day)

In fifteen years of pleasant journeys (in a small van)
Probably the only rock band to have never sang,
From one eventful evening to the next,
The exact same list of music sets

Is that particularly brave ?
God only knows…

A radical approach, impossible to follow
By predictable record labels and professional fellows
Like little tin soldiers all walking in line
Bowing senselessly towards the digital shrine

Symbol of the rapid classification procedure
Of our terribly meager binary era
 
Here come the season’s hits
A winter having lasted fifteen years, that still isn’t over

Fruit-Album recorded by Bud and Emile Martin

Previously unreleased pieces edited, mixed and set on their way by Bud (Studio Garage).

With :

Junkaz Lou, Francesco Pastacaldi, Denis Schuler, Aymeric Avice, Fantazio, Benj Colin, Pierre Meunié, Stephane Danielidès, Frank Williams.

 

Sylvaine Helary , Aymeric Avice, croisés il y quelques chemins d'années ont
> mis des mains sans gants dans le son, et ont vu comment barbouiller de boue
> la figure lisse et souriante du Jazz bourgeois pour voir si derrière il n'y
> avait pas quelques cris salvateurs de nos grands parents étouffés. Moi,
> Fantazio, m'engage à  chercher avec eux comment régler des comptes en
> profondeur avec ceux qui traitent les morts comme des pestiférés, les
> enfants comme des faire-valoir. D'un jour sur l'autre, d'une nuitée par
> dessus l'autre nous tâcheront ensemble de trouver les refrains des vieilles
> araignées des villes et des éléphantes timides.

Paris, 2004

 

Fantazio ou « le tremblement de la vie »


C'est une sorte d'Adriano Celentano punk et débonnaire. Un homme au regard profondément
mélancolique qui a baroudé de Berlin à Bogota, du Xinjiang à Buenos Aires (sa mère était Argentine) et
connu à peu près toutes les expériences musicales imaginables. Un « homme-contrebasse », comme on l'a
appelé parfois, en référence à son instrument fétiche, qui a fréquenté les squats, les arrière-salles des
cafés, les free-parties, les trains, les couloirs du métro comme les scènes les plus renommées. Un drôle
d'animal qui ne s'est jamais laissé apprivoiser, artiste dadaïste se jouant des genres pour composer des
pièces qui sont un peu à la musique ce que l'art brut est aux arts plastiques : indifférentes aux conventions.
Où l'on trouve (en songeant parfois à un certain Albert Marcoeur ou aux premiers Areski-Fontaine) des
morceaux de free jazz se mêlant à des paysages sonores comme sortis tout droit de l'inconscient, des
comptines enfantines se dérèglant comme des petites bombes à retardement, des mélodies accrocheuses
enlevées d'une voix chaude (et se régalant des idiomes), des cordes omniprésentes, des claviers sans
entraves, des percussions à rebondissements et autres procédés non répertoriés – et souvent très drôles –
traduisant toutes les palpitations de la vie.
Après deux albums sous le nom de Fantazio, un disque en duo avec la chanteuse Katherina Ex et un
quatrième avec le saxophoniste Akosh et le batteur Denis Charolles, voilà surtout notre imprévisible
énergumène qui, à un moment charnière de son existence, revient avec un nouveau projet : un album qui
pourrait être comme une synthèse de toutes ses aventures passées. Susceptible de séduire une large
audience tout en restant fidèle à l'intrinsèque singularité de son maitre d'oeuvre, à la fois auteur, vidéaste,
improvisateur, performer et musicien dans l'âme. Pour tenter de saisir un peu de ce poète à fleur de peau,
traquant « l'aléatoire » et « l'accidentel » comme l'essence de la vie, nous l'avons soumis à la question.
La Madelon ?
Ma grand-mère chantait cette chanson populaire, « La Madelon vient nous servir à boire... », quand j'étais
enfant. J'adorais ça. Il m'arrive toujours d'improviser de fausses vieilles chansons militaires et coloniales
(il se met à chanter d'une voix de stentor : « rendez-nous le soleil de Tunis... », NDLR). J'adore quand ça
grince. Et c'est tellement exagéré que ceux qui le prennent mal sont vraiment très crispés. Ma grand-mère,
dactylo, pianiste amatrice, qui aurait adoré devenir chanteuse d'opérette, m'a offert une contrebasse quand
j'avais quinze ans. J'allais m'inviter dans des fêtes privées avec mon instrument, le frappant du pied et
criant en plusieurs langues pendant dix minutes pour être sûr que les gens se souviennent de moi !
La chanson ?
J'ai chanté en toute circonstance, un peu partout, et je peux encore aujourd'hui aussi bien chanter dans un
centre social que faire une performance dans un musée d'art contemporain. La musique est un boulot
artisanal et social, un outil pour qu'on se rassemble et qu'on soit émus d'être ensemble, comme le vaudou.
J'ai toujours voulu faire un truc polymorphe, qui change tout le temps. J'adore Elvis autant que John Cage,
les chansons napolitaines ou Eminem. Mais je peux très bien aussi comprendre qu'un jour de pluie, en
hiver, dans la 504 de tes parents, une chanson de Sardou ou de n'importe qui d'autre, puisse t’émouvoir.
C'est une alchimie de situation à chaque fois mystérieuse.
Le punk ?
A 14 ans, quand j'ai découvert les Cramps et le punk, j'ai découvert un univers faramineux. Surtout avec
l'idée qu'il me faudrait sans cesse tout effacer pour tout réinventer et repartir de rien, que chaque concert
serait l'occasion d'un nouveau vertige, le plus en adéquation possible avec mon état psychique du
moment.
Eléphant ?
Ce mot m'évoque d'abord mon père, qui aimait beaucoup les éléphants et qui, je m'en suis rendu compte
après sa récente disparition, a été d'une solidité incroyable. Une solidité qui m'a permis de prendre du
LSD à 14 ans et d'aller loin, dans la rue, avec des punks, des skinheads, des poly-toxicomanes plus âgés
que moi, parce qu'il était là, comme un filet de sécurité. Ce mot me renvoie aussi à l'affiche du film de
David Lynch, Elephant Man, que j'ai vu à l'âge de dix ans, deux ans avant la mort de ma mère, en passant
devant le cinéma « Le Bretagne », à Montparnasse, et qui m'a mis pendant des années dans des états
d'angoisse gigantesques, irrationnels, et de grandes dépressions enfantines, au point que ma mère m'a
envoyé à douze ans voir un psy.

Berlin ?
J'ai vécu à Berlin de 1995 à 2000 et c'est une ville qui m'a énormément offert. Qui m'a donné confiance et
fait prendre conscience que je pouvais gagner ma vie en faisant de la musique. Que j'avais un style et que
la vie était pleine de magie et de coïncidences. Les deusche mark pleuvaient dans ma poche et je pouvais
me produire sur une dizaine de lieux dans un même périmètre, comme une sorte de rituel mystique.
Cabaret ?
Ce mot me renvoie au mouvement Dada, quand les artistes faisaient un lien entre la politique, la violence
radicale et l'art. Pour moi, c'est ce qui manque actuellement. Même si, plus qu'à Paris où je suis né et où
j'ai grandi, je l'ai trouvé à Rennes, où je vis aujourd'hui, dans un lieu comme le Bois Harel et tant d'autres
lieux nés ces dernières années sous différentes formes.
Boris Vian ?
Ses livres et sa personnalité m'ont conforté dans mon approche de la fantaisie du monde. Il a un aspect
polymorphe que je trouve très émouvant. J'aime aussi chez lui sa pratique du jazz bien sur, mais aussi sa
méchanceté, sa cruauté. « L'Arrache coeur » est d'une cruauté et d'une violence incroyables et je ne
supporte pas l'image d'auteur pour adolescent, un peu niais, qui lui est encore accollée.
Buster Keaton ?
J'étais à Bruxelles il n'y a pas longtemps avec sa continuité asiatique, un chanteur qui s'appelle Matthieu
HA. C'est le Buster Keaton franco-flamand-vietnamien ! On nous comparait à une époque. On me disait :
tu as ton équivalent à Bruxelles, un mec qui chante partout avec une voix de castrat ! J'adore Keaton,
parce qu'il est froid comme une machine et le plus profond des artistes du burlesque muet.
Machine ?
Ce mot me fait penser à l'expression « machine molle » de William Burroughs. Je trouve très belle
l'association des deux mots. Plus que la psychologie et la psychiatrie c'est selon moi les rouages, la
mécanique, qui peuvent aider à comprendre les gens. Quels que soient les troubles ou les traumatismes
que tu as eu, c'est inscrit dans ton corps. On passe notre vie à chercher retrouver les origines de nos
troubles, de nos emprisonnements, des rôles sociaux qu’on a endossé et qui forment des couches
superposées de protection, qu’on croit être nous-même, et sous ces couches, battent des cœurs endormis
qui sont des machines molles glissantes et gorgées de flux sanguin.
Le prochain album ?
Ce sera un disque en trio, avec le batteur, percussioniste et véritable machine de guerre Francesco
Pastacaldi, avec qui je joue depuis quinze ans et une musicienne coréenne Woo-Ree Hu aux claviers, à
l'alto et aux voix. Il devrait compter une douzaine de morceaux, qui s'enchaînent comme un voyage
radiophonique. Un peu punk disco, un peu hip hop underground, entre les Cramps et Guillaume
Apollinaire, avec du grain, des synthés crados, la matière de la vie, son tremblement.


PHA, Rennes, 2022