2018

Quand vous voyez un endroit pour la quarantième fois, et que vous avez oublié de tenter de le revoir comme la première fois, et qu’à ce moment là, vous le percevez quand même quelques secondes comme la première fois, c’est un petit coup de vent qui fait le vide, qui fait le travail, que vous avez laissé intervenir dans votre position

Ce même petit vent frais qui a réveillé l’anglais assoupi et mourant sur un banc dans le XIV ème il y a dix ans.

 

Prenez un objet, mais prenez le autrement : ce pot là, cette tasse, vous la prenez d’habitude par le côté, non ?

Cette fois, prenez le par le haut.

Un monde apparaît.

 

 

Le nouveau : tendresse ou domination sur le nouveau ; en fonction de l’état de la lumière qui se réverbère bien ou pas sur votre peau, vous vous alignerez sur la masse humaine en profitant que le nouveau vient d’arriver pour montrer que vous étiez déjà là.

Ou alors vous vous alignerez sur la masse souple des enfants, et vous serez heureux qu’un nouveau arrive, curieux comme si il s’agissait d’entrer dans un nouveau palais.

 

 

Le piquet enfoncé au coin de l’épaule, pour pouvoir porter des sacs lourds sans encombre.

 

Soirée aux ateliers d’Aran/

Le type me dit que je ne me rends pas compte de ce que j’ai vécu.

Et je lui dis que je me sens taré sans avoir besoin de me dire quoi que ce soit sur ce que j’ai vécu, que si je pense à ce que j’ai vécu, je deviens fou.

Et il me dit : mais tu n’es que ce que tu as vécu.

Mais je n’y avais pensé

Et pourtant je croyais que ce qui me rendait taré c’est toutes les pensées sur ce que je n’ai pas vécu ?

 

Vivre aux côtés d’enfants c’est : leur mettre en place des débuts de plusieurs territoires possible, voilà tout, pas un seul.

Pas linceul.

 

Ce caillou marron a traversé des crises qu’on ne soupçonne pas trop.

Il a roulé sa bosse, et toutes les autres bosses qu’il devait avoir en tombant de la montagne, et que la mer par ses aléas ininterrompus aura rendu doux et lisse comme un bijou léché par des déesses aux langues interminables.

 

Ces petits lieux viennent de l’histoire d’un frottement de mouvements d’avant-garde, et maintenant les voilà tous racornis et recroquevillés, effrayés de tout inconnu qui débarquerait d’un autre milieu.

Ils gardent l’orgueil des frottements passés au profit de petits savoirs pointus tout taris.

 

Laissez passer des gens chez vous, comme au carnaval de Dunkerque, mais toute l’année, faites oxygéner, laissez des gens rentrer, qui,  arrivés, mettront sans le savoir le doigt sur votre table de cuisine que vous n’aviez jamais  déplacée contre le mur, ce qui vous libère un espace.

 

Je pourrais maintenant revivre la soirée du 31, j’aurais du, par exemple trouver la détente pour ouvrir les bras, et crier les bras ouverts quand on était dans le garage.

Quand vous vivez, vous placez une partie de vous dans une pièce.

Le reste arrivera demain.