Un petit gars

Un petit gars était en panique parce que dans la nuit, ouvrant son cher et adorable à la fois esclave, donneur d’ordre, et de désordre, son oreiller, son doudou, son référent, sa maison, son filtre et son écran, j’entends son écran ; il vit tout à coup que tous les logos d’applications avaient le même visage.

Ce qui lui vint d’abord à l’esprit, c’est que quelqu’un lui voulait du mal, comme il se sentait et fragile et dans le bien, et qu’il avait toutes sortes de théories qui racontaient que le fragile, dans l’atmosphère globale, c’était devenu le mal, le découverte de cet écran fût un tour complet et gratuit pour un grand tourbillon infernal, un poulpe géant qui attrape tout sur son passage pour en faire une boule de nourriture plus géante que lui, d’autres boulettes de viande faits de sa chair, expulsées par la bouche du poulpe à grande vitesse,

Il s’efforçait pour calmer le jeu d’imaginer qu’il n’y avait pas d’atmosphère générale, que ça n’existait tout simplement pas, qu’il n’y avait pas vraiment d’époque non plus, et qu’il n’existait pas, par exemple, non plus, de nouvelle génération : chaque corps présent sur cette terre avait été traversé par bien des choses invisibles, élevé et nourri dans des lieux bien différents, chacun avec ses fenêtres, ses ouvertures ou ses cloisons, chacun élevé dans une atmosphère où sons de portes et vaisselle frappées, pincées, claquées différemment

La nouvelle génération plus désillusionnée, plus triste, à la mélancolie mieux intégrée, naïveté tendresse espoir de vieux mots ringards, et ceux qui les utilisent sont de pauvres types, ratés, qui ne savent pas encore que l’homme est mauvais, et qu’il faut se dépêcher d’être au moins aussi mauvais que lui, à l’unisson, et avoir une armure au moins aussi féroce que lui le jour où il viendra vous tuer. Le premier.

Notre dames des Landes, notre drame. Que notre drame descende, laissez le descendre les marches du temple... N'empêche qu'en apparence dans le monde de l'habit qui fait le moine, (l'habit kiffait le moine!) gauchistes, loosers, pas dans la win, oui, peu de hauts talons et d'attributs jet-set, au milieu des arbres, c'est qu'après des années de recroquevillements intimes, les arbres suffisent en photo, les luttes collectives semblent maladroites, c'est vrai les marxistes en 4X4 ne sont pas encore apparus, les amazones à cheval au sein droit coupé et string fluo californiens Madmax, revendiquer ça fait looser. Lâche, indifférent qui sait tout sur l'homme, c'est plus SexXx, on adore l'armée du mépris hautain, ça donne envie d'en être, le musicien super connu avec du monde à son service qui s'enferme dans les loges, le soldat bourgeois qui n'a besoin de personne, revenu de tout, les yeux Nespresso qui expulsent leurs larmes à l'abri des regards en capsules vides, on détourne le regard, attendre encore quelque chose de l'autre c'est revêtir l'habit du bouffon.

Je connais beaucoup de gens bien qui voient NDDL de loin, comme ils voient la Syrie de loin, on peut tout voir de loin, à tout moment le loin est offert sur un plateau, jusqu'à ce qu'il semble tout près.

NDDL ne regroupe pas en soi des gens bien, ni mieux qu'ailleurs, ça regroupe des êtres pour qui, peut être, comme tout le monde s'en doute, jouer le jeu de la course folle des constructions humaines sans fins fabricantes implacables de dépressifs isolements au kilomètre, décident de prendre sur leur espace temps, stoppent leur planning en roue libre pour se poser sur la terre ferme.

Il y a du monde ici qui a tissé des liens et des forces qui ferait baver toute petite star crainte isolée du monde du néant politique.

Très surprenant qu'il n'y ait pas, en fait, 300.000 personnes de plus à Notre Dames des Landes, tous les musiciens du pays, des touristes qui ne reviennent pas dans leurs pays, et des députés torse nus qui se surprennent un peu à tisser de grandes couvertures chaudes avant de mourir, sur la terre érotique et mouillée, des écrivains de St Germain des champs, des patrons de PME,des animateurs de radio FM, et des VRP d'aquitaine.

Que les garçons et les filles sexy du monde entier viennent à la ZAD pas pour prendre des selfies, mais 4 Ever, et on entendra des parents, venus de St Tropez en 4X4 obèses venus récupérer leurs enfants après 15 années de chevauchées épiques sur les vieux chênes, pas pour les ramener à la maison, juste pour leur faire un coucou qui risque de s'éterniser...

Et voilà qu'une femme de préfet de la Ruhr s'exclame:

"Ce n'est pas des gauchistes, ici, ce sont des êtres, avec des jambes, qui se sont arrêtés cinq minutes, dix minutes, au bord du gouffre, pour boire de l'eau, et de l'eau chaude, et des boissons qui n'existent pas! Mais ils étirent le temps,mais dans l'autre sens que nous! Ma parole, je retourne chercher les 4X4, les Humer, les boîtes à pharmacies, les copains mafieux, les échangistes du cap d'Agde, les chefs d'entreprises de Taïwan, les commerçants et les auto-entrepreneurs du Paca-CAC 40, putain, c'est là que ça se passe, mais qui nous a fait perdre autant de temps!Mais qui est le salaud qui nous a fait croir... De la détente bon sang!"

Je suis reparti, je n'ai rien vu, mais j'ai quand même cru voir une femme en Givenchy, foulard Hermès brodé ZAD accroupis, penchés sur un plan de basilic très préoccupés par les dégâts des nouveaux engrais flamands.